Nous perdons un véritable poète. Ton livre « Zhang-Fu disait » est un délice d’intelligence, d’humour et de poésie. Ta poésie est porteuse de tant de sagesse, elle raconte les petites choses de la vie, avec bienveillance sur le genre humain, sur les gens simples, les gens de la Creuse, les gens qui t’entourent, les gens comme toi et moi.
Tu es de ces êtres difficiles à apprivoiser. On s’est d’abord côtoyé lors de réunions du Scriptorium à Marseille. Après pas mal de temps tu es venu à une soirée de lecture à la maison, puis tu as accepté de participer à la résidence d’écriture en montagne à Aillon-le-Jeune.
Tu nous as régalés de tes petites phrases pleines d’astuces et d’espièglerie. Toujours avec tes carnets pour tester et retoucher un poème. Tu nous parlais de ton projet de roman, sur ton histoire, sur l’histoire de ta famille. Tu semblais toujours un peu pressé, d’agir et de partir ; de partir où ?
De ton parcours de scientifique et de médecin-chercheur à Paoli-Calmette, tu as gardé une méthode de travail est une grande discipline intellectuelle. Tu faisais ton œuvre de poète comme un artisan, dans le sens de ποιητής, consacrant les heures du matin aux taches de la vie courante, réservant ton temps libre de l’après-midi à cette quête d’écriture. Tu nous disais récemment : « lorsque j’ai écrit un haïku qui fonctionne bien, ma journée est réussie ».
Tu avançais en écriture avec une joie enfantine et de conquête. Tu avais tout pour aller encore loin en poésie. Tu savais malgré ta modestie que tu avais une œuvre à poursuivre. Tu avais ce sentiment d’urgence, ce sentiment qui pousse à avancer parce nous sommes tous périssables et qui te rendait si pressé. On aurait aimé te connaître un peu plus encore. Mais la vie en a décidé autrement.
Daniel tu es parti trop vite, trop tôt, trop loin. Je peine à le croire.
Allez dis-le Daniel, ce n’est pas vrai. Zhang-Fu va revenir !
Une interview de Daniel par Christophe Jubien
Extraits de ses livres
Zhang Fu disait aux Editions Henry
sur la guerre
pousseront les ruines
sur les ruines
pousseront les herbes
et ce sont elles
qu’on dira folles
Extrait d’Un cercueil à deux places aux Editions Gros textes
Le sac
Elle fouille dans son sac
comme dans sa vie
elle n’y met plus les choses lourdes à porter
le chien n’y est plus
mais il y a le collier
les enfants n’y sont plus
mais il y a leur adresse
le mari n’y est plus
mais il y a sa photo…
Extrait de l’espace
elle se sent légère…
Extrait de L’espace commence au bord de la fenêtre aux Editions Alcyone
L’arbre
Devenir l’arbre
pour jouer avec la lune
voir se poser les oiseaux
dans ses cheveux de bois
faire des nœuds pour ne rien attacher…